L'inspiration première vient de l’œuvre de Cézanne qui transforme la vision en volumétrie concrète. Braque et Picasso en créant le courant cubisme abolissent la perspective, principe fondamental de la peinture depuis la renaissance. Dès lors le spectateur est confronté à une image dont il peut faire le tour sans avoir à ce déplacer : la troisième dimension entre dans l'espace bidimensionnel.
Cézanne remet en question la perception en perspective issue de la Renaissance Italienne. Il déforme les volumes et les plans, quitte à créer de « fausses perspectives ». Dans ses natures mortes, on peut observer simultanément différents points de vue et des décalages de plans. Par exemple, la table est montrée vue du dessus, alors que les fruits sont représentés vus de face. Il n’hésite pas à s’éloigner de la « justesse » du dessin, et à déformer les choses, si cela peut servir sa composition et mettre en valeur tel ou tel contraste qui l’intéresse, ou s’il veut mettre en avant une forme particulière.
Il aboutit aussi dans ses compositions à une grande simplification des formes et des surfaces colorées, de plus en plus géométriques, qui s’éloignent de la représentation réaliste de la peinture classique.
Suivant la voie ainsi ouverte Georges Braque et Pablo Picasso, les premiers, ont la volonté de représenter l’objet tel qu’il est, dans sa globalité, dans son intégralité, et non tel qu’on le voit de manière directe, c’est-à-dire du seul point de vue de notre oeil. Il y a donc une rupture radicale avec la représentation perspective à point de fuite de la Renaissance qui présente la scène de manière réaliste à partir d’un point de vue unique qui correspond à celui de notre regard.
Les cubistes veulent montrer ce qui fait l’essence d’une chose, la montrer dans son intégralité. Ils veulent montrer tout ce qui peut caractériser une forme, même si dans la réalité, on ne peut pas le percevoir simultanément. Par exemple, ce qui caractérise une tasse, c’est la anse que l’on voit quand on l’observe de face, l’ellipse qui se dessine quand on la regarde d’au-dessus, et la forme du récipient lui-même vu de profil.
Le cubiste, va chercher à montrer l’essentiel de ce qu’est une tasse, en représentant ces différentes caractéristiques, ces différents plans, simultanément sur le plan de la toile, même si cela ne correspond pas à ce que l’on peut observer dans la réalité. Ce principe est appliqué aux objets comme aux personnages.
Cela fait penser aux représentations égyptiennes dans les hiéroglyphes, qui, pour signifier la chose en montrent les éléments caractéristiques et essentiels, même s’ils ne se situent pas nécessairement sur un même plan dans la réalité : pour montrer une vache, on va en montrer le profil, et simultanément, les cornes qui la caractérisent, vues de face. Il en va de même pour les personnages qui sont représentés avec le corps vu de face et le visage de profil.
On voit d’ailleurs à cette époque de nombreuses références à l’Afrique et à l’Egypte dans toute la culture, aussi bien littéraire, que théâtrale, au cinéma ou en musique. Le thème des momies est souvent emprunté ainsi que de nombreux thèmes orientaux et africains. C’est la mode de l’exotisme et de la fascination des autres continents que sont l’Asie, l’Inde et l’Afrique.
L’aspect géométrique des formes cubistes est aussi très inspiré des sculptures africaines. De nombreux artistes s’y intéressaient de très près. Certains portraits ressemblent en effet à s’y méprendre à des copies de masques africains.
Inspiré par ces types de représentations, le cubisme cherche à traduire la vérité de l’objet en l’analysant de manière concrète dans chacune de ses parties et à rendre compte de ces différents points de vue sur une même image. Mais l’analyse des formes et est de plus en plus complexe et les formes deviennent de plus en plus morcelées, fractionnées. À force de complexité, les cubistes finissent par perdre la lisibilité de l’image.
Face à cette perte de l’image, les artistes ressentent alors le besoin d’introduire des éléments rapportés pour permettre à nouveau la reconnaissance de l’objet. Ils introduisent alors dans leurs tableaux des éléments issus du réel, pour donner des indices et permettre à nouveau la reconnaissance de l’objet : lettres, chiffres, fragments de matériaux divers, échantillons prélevés dans le monde réel.